Vendredi 15 janvier 2021, le vigneron Cyril BONNET @champagne Bonnet-Ponson, a accueilli une quinzaine de producteurs à Chamery pour évoquer la vinification en Agriculture Biologique.
Chamery est un village exemplaire dans la Montagne de Reims. Fruit de la bénéfique émulation entre les vignerons du village, les parcelles conduites en bio et en conversion sont en passe de représenter 30 % de la surface de ce vignoble !
C’est heureux car la zone de captage de Villers-aux-Nœuds, attenante au village, soufre encore cruellement des pratiques agricoles. Les analyses d’eau brute y présentent des taux de contamination aux pesticides, 3 à 5 fois supérieurs aux normes de potabilité, nécessitant la couteuse installation d’une usine de retraitement pour éliminer les molécules toxiques.
Cyril a pour sa part décidé de bannir les pesticides de synthèse sur son domaine depuis 2013, année où il convainc sa famille de convertir en AB le parcellaire du village. Il poursuit l’engagement de l’intégralité du domaine l’année suivante, sur les villages de Verzenay, Coulommes-la-Montagne et Vrigny, soit une cinquantaine de parcelles sur 10 hectares.
Afin de mener cette tâche à bien sur ce parcellaire fort morcelé, il s’est entouré de 4 salariés permanents, d’un couple qui les rejoint à partir du mois de janvier et de 3 à 4 personnes durant le palissage. Pas toujours facile de gérer les contaminations dues au voisinage, il faut réagir et s’organiser au coup par coup. « On fait de son mieux. Plus on sera nombreux à se passer de pesticides de synthèse, plus on aura de résultats, collectivement. »
Cyril complète les traitements au cuivre et au soufre par des préparations à base de plantes qu’il récolte lui-même, consoude, prêle, ortie… Il développe sur son domaine l’agroforesterie et se forme à la taille douce.
Après les 3 années de conversion réglementaires, Cyril vendange ses premiers raisins certifiés bio en 2016. Il garde 80% de sa récolte et commercialise les raisins restants en les valorisant en bio.
« Le plus dur c’est de produire de beaux raisins. Ensuite, l’idée est d’intervenir le moins possible sur les vins. J’ai pris l’habitude de réaliser un pied de cuve une semaine avant la vendange, en ayant soin de couper des raisins dans l’après-midi pour qu’ils ne soient pas froids. 70 % des jus environ ne seront pas sulfités du tout. J’utilise un pressoir Coquart de 6000 kg, modulable. Je laisse débourber les jus une nuit. Les fermentations partent très vite. Je ne sépare pas forcément tailles et cuvée, cela dépend. Ensuite je ne touche plus aux vins jusqu’à la mise. Je laisse presque toutes les cuvées faire leur fermentation malolactique naturellement. Je ne bâtonne pas, ne filtre pas et ne colle pas.
Mon chai n’est pas très bien isolé. En ouvrant les portes une semaine, les vins passent au froid naturellement. Mon mode de vinification est très simple.»
25% des vins sont élevés en fûts, sans recherche de composés aromatiques. En tout une cinquantaine de tonneaux à ouiller. Cyril a également fait l’acquisition de 2 jarres en grès et il expérimente un ozoneur pour remplacer le méchage des tonneaux.
Les assemblages sont faits à la dernière minute et pour le tirage, Cyril utilise maintenant du sucre de betterave bio français. La production annuelle est de 70 000 bouteilles.
« Pour la transition entre production bio et non bio, le problème c’est la gestion de la réserve et de sa traçabilité. Il faut réfléchir à si on souhaite garder une continuité avec le style des vins que l’on faisait avant. J’ai pris mon temps pour ma cuvée perpétuelle. Je n’ai terminé d’écouler ma réserve non bio qu’en 2019. Chacun doit trouver sa propre logique, en fonction de l’âge auquel on souhaite vendre ses vins, ses nécessités économiques, sa réserve disponible. »
Cyril fait déguster à ses visiteurs quelques vins clairs, dont on note déjà la belle maturité. Un assemblage de 3 cépages de Vrigny et des Chardonnays de Coulommes, élevés en fût et sans soufre. Un « tout vin » de vieilles vignes de Verzenay, sa réserve bio de 2017 à 2020 et enfin un assemblage des 7 cépages élevé dans un œuf en grès. Ils ont aussi la chance de découvrir, sa cuvée bio « Seconde Nature » Chamery Premier Cru, sans soufre.
« Je n’ai pas souhaité créer une nouvelle marque en arrivant sur le domaine, c’est important pour moi d’honorer le travail de ma famille, mon grand-père, mon père qui se sont tant investis et qui ont construit mon outil de travail .
Pour moi, le passage en bio permet de produire des vins qui ont plus de profondeur, de longueur. Je trouve qu’en travaillant les vignes de cette manière, j’obtiens de belles acidités, des cuvées structurées et équilibrées.»
Pour aller plus loin sur la réglementation en vinification en AB, vous pouvez consulter la fiche de réglementation « Réglementation Biologique » ici.
Les VIGNES BIO OUVERTES sont organisées par Bio en Grand Est @agriculturebioGE et l’ACB ainsi que Les Chambres d’Agriculture de Champagne, dans le cadre du projet de développement de la Filière Champagne Bio, financé par Les Agences de l’Eau, pour la préservation de la ressource en eau.