De retour en 2012 sur le domaine familial, 10 hectares répartis sur 30 parcelles, le premier objectif de Flavien est d’arrêter des herbicides. Progressivement, il augmente la part du domaine charrutée. Peine sur les 2 derniers hectares les plus éloignés. Son voisin, José Ardinat, un des pionniers de la bio en Champagne, fait figure de modèle. « José a toujours 3 semaines d’avance sur nous au niveau du travail des sols ! Il explique que sur notre terroir, il ne faut pas « enlever l’herbe, mais l’empêcher de pousser ! » Dans mon parcellaire, je n’ai qu’une vigne qui supporte l’enherbement. »
Sensibilisé à la qualité des vins produits en bio et biodynamie, Flavien lance la conversion progressive du domaine en AB en 2016, une année bien difficile en Champagne. « Une expérience édifiante au final ; j’ai perdu les trois quarts de ma récolte ! Cela a entrainé une grosse remise en question de ma stratégie. J’ai compris qu’en AB qu’il fallait toujours être prêt face aux intempéries. J’ai investi dans du matériel, des chenillards Chappot pour aller traiter même sur des sols non ré-essuyés, être toujours réactif, avoir du matériel d’avance en cas de casse et j’ai conservé mes objectifs !»
« Les années suivantes sont plus clémentes. J’ai rentré ma première vendange certifiée en 2019 et 2020 a été une excellente année. » Le vigneron fait appel aux conseils de l’entreprise Viti Concept qui suit un très grand nombre de domaines en AB. En moyenne, le vigneron réalise 10 à 12 passages par an. Il lui faut 5 heures pour effectuer un traitement.
« En 2021, l’année terrible, cela été une autre histoire. J’ai fait 24 passages. Mais à la grande différence de 2016, je ne me suis pas jamais laissé déborder. Je regrette seulement d’avoir démarré avec des doses de cuivre un peu trop faibles. Mais on a été plutôt bon ! On a vendangé 5000 kg/ha, une résultat très satisfaisant compte-tenu des conditions climatiques sur notre secteur. »
« Je travaille avec ma femme, mes parents et 3 employés. Ce sont des vieux de la vieille, ils ont une trentaine d’années de maison, beaucoup de métier ! Ils ont bien perçu que le métier changeait. Ils savent se rendre disponibles, le week-end et par tous les temps. Ils ont très bien accompagné et compris la transition de nos pratiques, à laquelle mes parents adhèrent également. Mon prochain défi va être de trouver à les remplacer quand ils vont prendre leurs retraites.
Ma stratégie pour l’avenir, c’est de réduire ma surface et d’arrêter de courir. L’idéal serait d’avoir 4 salariés et qu’ils soient chacun en charge de 2 ha de vigne. Un jardin, un jardinier.»
Flavien présente à ses hôtes la très jolie parcelle de « La Fontinette » un hectare de Meuniers à-sur-Marne. « Elle a été plantée dans les années 60 par mon grand-père. Il s’agit de ma vigne test, la première dans laquelle j’ai arrêté les herbicides, commencé la conversion en AB, puis mis en place l’agroforesterie. Argileuse et très humide, la vigne comprend deux sorties de sources. J’y ai planté en 2018 différentes essences d’arbres, Peupliers, Erables Champêtres, Frênes, Charmes, …, afin de pomper l’eau et d’apporter de la fraicheur l’été. J’ai choisi une densité de 100 arbres /hectare. 4 hectares sont maintenant plantés de cette manière dans le domaine. Je pense continuer de les rogner à 3 m, mais je ne sais pas encore exactement comment je vais les conduire à l’avenir. On verra. On a également installé une haie arbustive autour de la parcelle.
« L’idée c’est de revenir à un esprit bocage, de retrouver un véritable écosystème, dans lequel les vignes puissent cohabiter avec d’autres espèces en harmonie. Pour l’heure, cette vigne est d’une régularité à toute épreuve, quoiqu’il arrive elle donne entre 7 et 8000kg. »